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Autres nouvelles : Et tout est dépeuplé

Petites explications :

Ce texte provient d’un défi spécial lancé sur un site de jeu type visual novel qui se déroule dans un lycée. Le but était d’imaginer, en 800 mots, la vie au lycée si le personnage que l’on incarne n’avait jamais existé. J’ai choisi de me placer du point de vue de Nathaniel, l’élève modèle. Au fil des épisodes, nous découvrons que son père le bat, et nous mettons tout en œuvre pour le sortir de là. Voilà donc, de mon point de vue, la vie de Nathaniel au lycée, si notre personnage n’était jamais apparu dans sa vie.

PS : C’est en partie ce personnage qui m’a inspiré la back-story de celui qui deviendra Nathan dans Point de Rupture.

PS² : Voilà le jeu en question, Amour Sucré, on va faire comme si j’assumais.

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« Et avec toutes mes félicitations. Vous avez la mention très bien, et vous l’avez amplement méritée. »

Madame Shermansky me tend la feuille sur laquelle sont imprimées mes notes à deux mains, avec ses yeux plissés et son petit air satisfait. Je la récupère en tentant de faire bonne figure.

« Merci, madame.

– Vous avez prévu de rejoindre une école d’ingénieur, c’est ça ? Je suis sûre que vous vous en sortirez à merveille. Je vous souhaite une bonne continuation.

– Merci… Au revoir. »

Je jette un bref coup d’œil à la feuille avant de la ranger dans sa pochette, et tourne les talons pour sortir de cette pièce. Pour la dernière fois.

« Nathaniel ? »

Je la regarde, intrigué.

« Je suis fière de vous. Vous êtes l’un des meilleurs élèves que ce lycée ait connu. »

Je souris maladroitement et la remercie avant de me précipiter dans le couloir, plus ému que je ne voudrais l’admettre.

Je suis fière de vous.

J’aurais aimé que ça vienne de quelqu’un d’autre.


Une fois dans la cour, je presse le pas. Ce n’est pas que j’aie vraiment envie de rentrer chez moi, mais ce lycée… j’ai vraiment hâte d’en finir avec tout ça. Plus qu’un pas…

« Nathaniel ? »

Melody… Bien évidemment.

« Ouf ! J’ai cru que j’arriverais jamais à te rattraper ! Tu marches vite… Dis-moi… »

Melody, je déteste quand tu es comme ça. À te dandiner d’un pied sur l’autre devant moi, à bafouiller, à rougir… Trois ans que ça m’épuise. Trois ans que je n’ose te le dire.

« Est-ce que tu vas… aller au bal ? »

Je me retiens de soupirer. Je sais très bien ce que tu comptes me demander, Melody. Et tu sais quoi ? J’en ai marre. J’en ai marre de m’efforcer à être ce garçon parfait en tout point, celui que tu admires d’une façon si malsaine. J’en ai putain de marre.

« Non, j’ai pas envie. De toute façon, j’ai personne avec qui danser. Bonnes vacances, Melody. »

Son visage se décompose mais, avant qu’elle n’ait le temps de dire quoi que ce soit, j’ai déjà fait demi-tour et marche aussi vite que possible. Sans me retourner.

Bonnes vacances… Je lui ai dit ça comme si on allait se revoir. J’ai encore du mal à réaliser que je quitte ce lycée pour de bon. Mais pour aller où…

Une fois suffisamment éloigné de l’établissement, je ralentis progressivement le pas puis m’arrête complètement. Enfin seul… Je prends une grande inspiration, les yeux fermés.

Je n’ai tellement pas envie de rentrer. Tellement pas envie d’affronter mon père, de l’entendre me rappeler à quel point je le déçois, tellement peur qu’il me… Je ne peux retenir un frisson. Combien de temps est-ce que ça va encore durer ? Combien de soirs à rentrer à la maison avec la boule au ventre ? Combien de fois à voir ma mère et Ambre détourner les yeux sans rien dire alors qu’il se mettra à me hurler dessus au beau milieu du repas ?

Son poing qui heurte violemment la table, le bruit des verres qui tremblent, mon estomac qui se noue…

Combien de fois, encore ?


J’ai une boule dans la gorge, les larmes qui me montent aux yeux. Je sais pas combien de temps je pourrai tenir encore. Cette putain de pression constante, cette peur primitive qui tend mon corps entier à chaque fois que j’entends ne seraient-ce que ses pas qui montent les escaliers, ces soirs où je suis terré dans ma chambre à réviser à en faire des nuits blanches, à me tuer à la tâche pour maintenir un dix-sept de moyenne qui ne le satisfait même pas.

À quoi ça rime, tout ça ? Ces bonnes notes, ces félicitations à tous les trimestres, ce rôle de délégué principal ? Nathaniel, l’élève parfait. Nathaniel, le chouchou des profs. Le fayot. Le lèche-bottes.

Nathaniel, l’élève qu’on trouve au mieux sympathique de loin. Celui que l’on veut dans son groupe de travail mais pas dans sa bande d’amis. Celui que tout le monde connaît de nom, mais à qui personne n’a vraiment envie de parler. Trois ans dans ce lycée, mais aucun véritable ami. Non, cet endroit ne va pas me manquer.


J’aurais aimé… J’aurais aimé que quelqu’un vienne vers moi. Quelqu’un avec qui j’aurais pu tout partager, nouer des liens forts, quelqu’un… Quelqu’un qui aurait vu la détresse dans mes yeux, aurait remarqué mes cernes, une marque sur mon bras, n’importe quoi. Quelqu’un qui se serait inquiété pour moi, quelqu’un à qui j’aurais pu me confier. Entrevoir l’espoir de quitter cet enfer…

Mais personne n’a rien vu. Je suis resté seul, et je le suis toujours.

Il n’y a personne pour me sortir de là.


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