Projet : Inktober 2023.
Objectif : publier une nouvelle tous les trois jours, rédigée en une heure maximum, en suivant la liste officielle du challenge Inktober 2023.
Ce texte se rattache à un ou plusieurs de ces thèmes : 7 – Goutte-à-goutte • 8 – Crapaud • 9 – Rebondir. / Temps : 54mn.
(cette nouvelle est également très inspirée d’un vieux rêve que j’ai fait ♥)
Tip, tip.
Le bruit était persistant.
Tip.
Suffisamment persistant pour le tirer du sommeil.
Tip, tip.
Il ouvrit les yeux. Raté, tout était noir. Il les ferma et les rouvrit… Pareil. OK, là, c’était bizarre. Où est-ce qu’il était ?
Tip.
Il tâtonna autour de lui, à même le sol. De la pierre… Il avait froid, terriblement froid. Mais ça, c’était sans doute parce qu’il était complètement trempé. Pourquoi, d’ailleurs ?
Alors là…
Tip, tip.
Il finit par identifier le bruit, même sans le voir. Ça ressemblait à des gouttes d’eau qui s’écrasaient au sol. Comme lui.
Il se releva doucement. Il n’avait aucune idée de la hauteur de plafond de l’endroit où il se trouvait, mais il semblait y avoir de la place. Oui, il tenait debout. Ce n’était pas un miracle vu son petit mètre soixante-cinq, mais tout de même. Au moins, il n’était pas blessé, il avait seulement un peu mal par endroits au niveau de son torse. Mais ça n’avait pas l’air grave.
« Eh ho ? »
Il doutait qu’on lui réponde. Ce qu’il voulait, c’était surtout savoir où il était. Le bruit résonna, son écho se perpétua, se heurtant aux parois durant un temps infiniment long. Il en eut presque le tournis. Il leva lentement les bras et se heurta à quelque chose. C’était solide, et ça semblait venir du plafond. Une stalactite ?
Très bien, les gouttes d’eau, le plafond fermé, les parois rocheuses infinies, et maintenant les stalactites. Il n’y avait pas de doute, il se trouvait dans une grotte, ou une caverne. Eh bien…
Voilà un lendemain de soirée qui ne ressemblait à aucun autre.
Oui, il avait bu, mais tout de même… pas au point d’aller se la jouer explorateur de Lascaux sur un coup de tête. Il se connaissait, et la chose la plus stupide qu’il ait jamais faite étant ivre avait été de voler un cône de chantier pour le ramener chez lui. Rien d’incroyable. Rien de semblable à ce qu’il vivait ce… matin. Quelle heure était-il ?
Il tâta sa poche de veste pour en sortir son téléphone. Trempé, comme lui. Il était inutilisable.
« Fait chier… »
Même s’il ne devait pas y avoir le moindre réseau ici, une lampe torche lui aurait sauvé la vie. Qu’est-ce qu’il allait faire, maintenant ?
Tip, tip.
Le bruit le rendait presque fou, l’empêchait de se concentrer. Il recula légèrement. Le mur… D’accord. Ce qu’il fallait, c’était être méthodique. Pour sortir d’un labyrinthe à coup sûr, il suffisait de longer toujours la même paroi. Cela pouvait être long, mais ça finissait forcément par fonctionner, et c’était bien mieux que de s’aventurer au hasard dans le noir sans but, au risque de trébucher sur quelque chose.
Il se lança. La main gauche devant lui, il tenait la droite appuyée sur la paroi et avançait lentement, à petits pas, décollant très peu les pieds du sol. C’était angoissant de progresser à l’aveugle, sans avoir la certitude qu’il n’allait pas tomber dans un trou ou autre chose, mais il n’avait pas le choix.
« Quand je vais raconter ça aux gars… »
Mais alors qu’il tournait, il eut un haut-le-cœur. L’odeur ici était infâme, et le mot n’était même pas suffisant pour décrire l’immondice qui lui sauta aux narines. Il se retint de vomir et n’essaya pas de déterminer ce qu’était cet étrange craquement sous ses pieds.
Tip, tip.
Il préférait ce bruit-là, tout compte fait. Il se décolla légèrement de la paroi. Peu importait ce qui pourrissait ici, il ne voulait pas marcher dedans. Il allait bien retrouver la paroi plus loin… Oui. Et l’odeur commençait à être derrière lui. Ouf.
Il progressa ainsi plusieurs minutes, tout tremblant, essayant de remettre les milliers de questions qui se bousculaient dans sa tête à plus tard.
Tip.
Le bruit était partout, les stalactites devaient être nombreuses par ici. Quelques fois, les gouttes lui tombaient dessus, ou alors, si près qu’il avait l’impression qu’elles atterrissaient juste devant ses pieds. Ça, c’était une bonne nouvelle, s’il se mettait à avoir soif. En attendant, il devait avancer.
⁂
Alors qu’il continuait sa progression, il lui sembla que le bruit de ses pas résonnait moins fort par ici. Il avait dû entrer dans un embranchement, et…
De la lumière ?
Il avança un peu plus rapidement. Oui, il y avait de la lumière par ici. OK, il ne fallait pas aller trop vite. S’il se précipitait, il pouvait tomber dans un trou, trébucher sur une pierre et se faire bêtement mal. Mais il devait aller par là.
Ses pas se remirent à résonner plus fort encore alors qu’il atteignait la source de la lumière. C’était grand. Et il écarquilla les yeux.
Il était presque comme dans un dôme mais enfin, il voyait son environnement. Et même s’il n’avait aucune idée d’où il se trouvait, il ne put s’empêcher de s’arrêter pour l’admirer.
Des centaines de pierres colorées étaient incrustées dans les parois noires, et scintillaient de mille feux sous les rayons… du soleil. Là-bas, tout en haut, il y avait une brèche. Il la contempla un instant, bouche bée. Il y avait une sortie. Ses yeux descendirent le long de la paroi. S’il grimpait ici, prenait appui là… Il n’avait pas fait d’escalade depuis un moment, mais cela valait le coup d’essayer, non ? C’était ça ou continuer à tourner en rond dans cet endroit, et…
« Oh bordel ! »
Il sursauta et dut se raccrocher à la paroi la plus proche, surpris. Une sorte de rat venait de lui passer entre les jambes, à une vitesse qui supposait que lui, il n’était pas perdu. Il cligna plusieurs fois des yeux, tentant de l’apercevoir une dernière fois avant qu’il ne disparaisse à un virage. Avait-il rêvé, ou cet animal avait des cornes ?
Il secoua la tête. Ce n’était pas le moment de penser à ce rongeur et aux quelconques mutations bizarres qu’il avait pu subir ici. Il fallait qu’il escalade cette paroi et qu’il sorte d’ici. Qu’il fasse sécher son téléphone, retrouve son chemin ou appelle à l’aide, et rentre chez lui. Fin de l’histoire.
Mais alors qu’il s’avançait vers le rocher qu’il comptait escalader, il entendit un bruit d’eau. Une rivière. Une rivière passait là. Ça, c’était bizarre, non ? Il s’agenouilla pour recueillir de l’eau dans sa main. Elle était claire, ne sentait rien, et il avait soif. Ça ne pouvait qu’être bon de boire un peu avant d’escalader et de se retrouver dehors, au soleil.
Il tentait de ne pas y penser, de ne pas se poser la question… Mais où était-il ? La soirée d’hier… Il se souvenait avoir quitté la maison, avoir dit qu’il allait visiter la forêt en rigolant, mais… mais une rivière ? Une grotte ? Jusqu’où était-il allé ? Et ses amis ? Personne ne l’avait suivi ? Qui l’avait mis là ? Il repensa au tas de charognes et à cette odeur immonde et eut à nouveau la nausée. Non… non, une odeur pareille, ça n’était qu’à un stade élevé de décomposition. Ça ne pouvait pas être l’un d’eux.
Il termina de boire et tourna le dos au cours d’eau. Juste au moment où…
Ce bruit…
Il se tourna lentement, déjà parcouru d’une sueur froide. Quelque chose émergeait de l’eau, quelque chose de gros, qui tenait autre chose dans sa gueule.
En une fraction de seconde, il comprit comment il était arrivé ici. Cette grotte était un foutu garde-manger, un immense garde-manger, pour ce… ce truc. Aveugles, sans aucune issue à leur portée, les proies ne devaient jamais aller loin.
Il fixa un moment la bête, les yeux écarquillés, le sang résonnant dans ses tempes. Trop d’écailles, trop de griffes, trop de yeux, et cette taille… Il ne faisait pas le poids. Elle était monstrueuse. Et la bête, cette chose qui ressemblait à un alligator qui aurait muté lui aussi, l’avait vu. Sa gueule s’ouvrit, béante, pour lâcher la proie. Dents rétractables. La… chèvre n’avait rien. Pour l’instant. Son pelage blanc et ses… plumes ? étaient immaculés. OK, il fallait partir. Les proies ne devaient pas aller loin, parce qu’elles ne le pouvaient pas. Lui, il pouvait.
Comme si la vision de ces plumes était le déclencheur qu’il lui fallait, il se retourna et se mit à courir. La chose aussi. Elle était assez silencieuse mais tout résonnait, par ici. Il entendit un bruit, comme une épée que l’on sort de son fourreau. Dents rétractables.
Sans réfléchir, il sauta sur le rocher au moment où il sentait un petit courant d’air, tout près de sa jambe droite, et un bruit de claquement sec qui lui donna une poussée d’adrénaline. Il sauta encore, se hissa sur le rocher suivant à la force de ses bras. Heureusement qu’il avait fait de l’escalade.
Il n’était plus très loin de la source de lumière. Si monstrueuse soit-elle, cette bête ne devait pas savoir grimper, pas comme ça, pas aussi haut… Les jambes flageolantes, il se laissa retomber et se retourna pour s’en assurer tout de même, haletant, terrifié.
Non, elle ne savait pas grimper. Mais ça n’avait rien d’une bonne nouvelle. Dressée sur ses immenses pattes arrière, elle se laissait tomber, les deux autres pattes en avant, ébranlant les rochers. Il y eut une secousse, de la poussière qui retombait. Le bruit n’avait rien de rassurant.
La structure allait s’effondrer.
Il retint un cri et se redressa net. Il tendit les bras aussi haut qu’il le pouvait, repérant deux prises dans l’embouchure. Là d’où venait le soleil. L’une était parfaite, l’autre suffirait. Mais au moment où il allait donner la poussée suffisante avec ses pieds, tout s’écroula. Il poussa un cri de surprise et d’horreur, cette fois, tandis qu’il s’accrochait à ses prises de toutes ses forces.
« Je sais faire beaucoup plus de tractions que vous, les gars ! »
Ah oui ? Alors c’était le moment de le prouver.
Il tira de toutes ses forces, gémissant à cause de l’effort, priant pour que ses mains ne soient pas trop moites. Il ne pouvait pas glisser. Il ne pouvait pas, parce qu’il avait entendu cette bête horrible, son grondement sourd en bas, à l’instant, et il refusait de mourir de cette façon.
Il se propulsa. Et lorsqu’il le put, il glissa sa main gauche, celle qui avait la prise la moins solide, hors de la caverne. Enfin, il put tirer tout son corps hors de là.
Il s’effondra sur place, sans même s’assurer qu’il était en sécurité, et se mit à haleter, les yeux détruits par le soleil. Il était dehors. En vie.
Il se passa le bras sur le front, à bout de souffle, et tourna légèrement son corps pour regarder dans la caverne par le trou. La créature faisait demi-tour. Il se laissa retomber sur le dos et poussa un long soupir de soulagement. Il l’avait fait. Il n’avait plus qu’à retrouver son chemin, se barrer d’ici… Il ne pouvait pas être si loin de chez son ami. C’était impossible.
Lorsqu’il en eut la force, il se mit debout sur le toit de la caverne, s’éloignant du trou. Cela semblait suffisamment épais pour qu’il puisse prendre appui dessus. Il ferma les yeux un instant, profitant des rayons du soleil qui réchauffaient ses vêtements trempés. Qui le réchauffaient un peu trop, d’ailleurs. Bon sang, pourquoi faisait-il aussi chaud ? On était en hiver, le brouillard hier était intense et c’était tout juste s’il ne neigeait pas, cela ne pouvait pas avoir changé aussi vite. Quelque chose n’allait pas.
Il ouvrit les yeux d’un coup, en alerte, et se mit à observer. Quelque chose n’allait vraiment pas. Parce que… ces oiseaux, ces animaux qu’il apercevait au loin, ces arbres… Tout cela ne ressemblait à rien de ce qu’il connaissait.
Un petit air de Stephen King, bien horrible comme on aime.
Merci ! Mes rêves doivent bien servir à quelque chose haha
Franchement angoissant comme on les aime… (comme les rêves) ou pas ! C’est marrant j’ai en tête une sorte de castor !
J’avais l’impression d’y être, ce qui ne me plait pas trop, et en même temps c’est les meilleures histoires, celles où tu termines, et tu as voyagé.
Je suis aussi sûre que tu m’avais parlé de quelque chose de ce genre… ou c’est un très fort déjà-vu
Ouais haha, c’est pas fou…
Un castor ? Étrange castor ahah
Bon, ça veut dire que c’est réussi ♫
Merci d’avoir commenté ! Possible que je te l’ai raconté, mais je sais même pas quand je l’aurais fait, il est très vieux ce rêve (: