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Les Envahis, 17 : Le monde d’Oizys

Deux semaines s’étaient écoulées déjà depuis son arrivée. Deux semaines qu’elle avait vécues comme un enfer. Pas d’amis, pas de sortie en ville, du vent et de la pluie sans discontinuer… Les habitants semblaient sympathiques et certains voisins leur avaient même offert des gâteaux pour leur souhaiter la bienvenue dans le village, mais cela ne remplaçait pas son ancienne ville. Ça ne pourrait jamais la remplacer.

Rose se sentait prisonnière et plus seule que jamais dans cette campagne. Elle n’avait même pas essayé de faire connaissance avec les élèves de sa classe, elle se sentait naturellement exclue et n’avait pas envie de faire le premier pas vers eux. La plupart n’avaient pas insisté et s’étaient contentés de rester entre eux sans lui chercher d’ennuis. Ils étaient tous déjà dans leurs groupes, avaient déjà leurs habitudes et n’avaient pas l’air de souhaiter inclure quelqu’un d’autre dedans.

Sauf un : un jeune garçon qui de mémoire s’appelait Andy, ou peut-être Andreas, et qui paraissait tout aussi seul qu’elle. Par moments, il jetait des petits coups d’œil furtifs dans sa direction. Il semblait vouloir établir un contact mais ne franchissait jamais vraiment le pas, et finissait simplement par lui sourire timidement ou la saluer de la tête. Elle se contentait de répondre brièvement et de passer son chemin, hésitante. Et dire qu’il était l’élève avec lequel elle avait le plus d’interactions… Son intégration dans sa classe était véritablement catastrophique.

Allez, on est bientôt mi-avril, plus qu’un, deux mois avant la fin des cours… Et avant les deux dernières années.

Elle retint un soupir à cette pensée. Le cours d’histoire touchait à sa fin, elle allait bientôt pouvoir rentrer chez elle… Mais en avait-elle seulement envie ? Chez elle. C’était trop dépaysant pour elle de prononcer ces mots. Elle ne s’y sentait pas chez elle, et il n’y avait aucun endroit dans ce village où elle se sentait vraiment bien. C’était ça, son quotidien.

Elle n’habitait qu’à une dizaine de minutes à pied du lycée mais ce soir-là, elle ne rentra pas directement. Le vendredi, elle terminait les cours plus tôt que les autres jours de la semaine. Elle en profitait pour se poster à l’arrêt du bus scolaire et attendre son petit frère qui revenait de l’école de Stonevalley, le village dans les landes. Rose savait que cela le remplissait de joie de la retrouver ici et elle sentait qu’à ses yeux, cela allait devenir un rituel. Voir sa sœur l’attendre à cet endroit précis chaque semaine marquerait le commencement du week-end.

« C’est le genre de rituel qu’on aime bien se fixer quand on est gamins, songea-t-elle. »

Depuis, elle s’était promis de ne jamais y manquer.

Leo se jeta sur elle lorsque le bus s’immobilisa, tout sourire. Comme à chaque fois, elle scruta les autres élèves d’un air méfiant, prête à les réprimander s’ils osaient rire de son protégé. Mais ils n’en firent rien. C’était sans doute l’unique avantage du fait de vivre dans ce village perdu : ici, son frère ne semblait pas souffrir de harcèlement scolaire à cause de sa différence. Peut-être même que Leo était heureux d’avoir déménagé, contrairement à elle. Le malheur des uns…

En arrivant à la maison, elle eut la surprise de trouver la porte verrouillée. Sa mère était donc de sortie ? Elle peinait à y croire mais après tout, il n’était pas impossible qu’elle ait trouvé la force d’aller faire quelques courses. Ce n’était pas plus mal, vu la quantité impressionnante de nourriture que pouvait avaler un enfant en pleine croissance. Heureusement, Rose constata que les placards ne manquaient pas de biscuits. Elle se tourna vers son petit frère, retrouvant le sourire.

« Allez, c’est l’heure du goûter pour toi ! »

Alors qu’elle lui servait à boire, un pense-bête accroché au frigo retint l’attention de Rose. Elle reconnut sans peine l’écriture de sa mère :

« Je sais que c’est difficile pour toi et que je t’en demande beaucoup, ma petite Rose. Pour te remercier, il y a une surprise dans ta chambre. »

Rose fit la moue, sceptique. Cela ne ressemblait pas à sa mère de lui faire des surprises. Plus depuis quelques années, en tout cas. Mais le goûter de son frère servi, elle s’empressa de se rendre à l’étage, se demandant ce qu’elle allait bien y trouver. Elle faillit pousser un cri de joie : sur son lit et étalé de tout son long, un petit chat noir et blanc dormait.

Elle avait toujours rêvé d’adopter un chat alors qu’elle vivait en ville, mais elle ne voulait pas imposer à l’animal de vivre enfermé dans quelques petites pièces, sans aucun accès vers l’extérieur. Cette maison et son jardin étaient l’endroit idéal pour que son petit compagnon s’épanouisse.

À côté de son lit se trouvait tout le matériel nécessaire à l’animal : litière en granulés et bac, gamelle, croquettes… Tout était prévu. Décidément, cela ne ressemblait pas à sa mère. C’était étrange, mais elle décida de penser à tout cela plus tard. Elle s’approcha doucement de son lit, s’accroupit devant et tendit la main alors que l’animal la regardait d’un air curieux. Il la renifla et lui donna un petit coup de tête, arrachant un sourire à la jeune fille.

Elle passa les dix minutes suivantes à l’observer, le laisser venir vers elle et le câliner doucement, alors qu’il se laissait faire en ronronnant. Il ne semblait pas particulièrement stressé, mais elle préférait prendre ses précautions. Puis elle retourna au rez-de-chaussée pour installer sa litière et sa nourriture dans la buanderie. Son petit frère remarqua bien évidemment son manège et bondit de sa chaise, agité, des étoiles dans les yeux.

« Eh oui, t’as bien compris, on a un petit chat maintenant ! Il dort dans ma chambre, alors tu peux aller le voir si tu veux. Mais vas-y doucement, d’accord ? Il faut pas lui faire peur. »

Il courut jusqu’à la chambre de sa sœur en montant les marches quatre à quatre, mais Rose ne se fit pas de soucis. Elle connaissait son frère, et elle savait qu’il saurait être délicat avec la petite boule de poils. Cela la fit même sourire tendrement, elle qui n’avait pas vu son frère aussi excité depuis longtemps. Soudainement, la porte d’entrée s’ouvrit à la volée et le bruit lui arracha un cri de surprise.

Sa mère se tenait dans l’entrée, les cheveux coiffés en un chignon approximatif… suivie d’Emily, sa meilleure amie, celle qui les avait aidés à déménager. C’était donc ça. Voilà d’où venait l’élan de courage de sa mère. Si cela ne la surprenait pas vraiment, Rose était déçue malgré tout. C’était trop beau pour être vrai…

Elle s’avança pour saluer Emily et étreindre sa mère.

« Merci pour le chat, il est trop mignon.

– De rien ma puce… C’est Emily qui m’a conseillé de l’adopter, je sais que tu adores les chats…

– Si jamais ça se passe pas très bien avec lui pour n’importe quelle raison, ils nous ont dit que vous pourriez le ramener au refuge à Newdale, poursuivit Emily. Mais il avait vraiment l’air adorable.

– Il l’est, confirma-t-elle en se reculant, le sourire aux lèvres. Leo est monté le voir. »

Elle posa ses yeux sur sa mère et s’aperçut qu’elle avait les traits tirés. Il n’y avait pas à douter que dès qu’Emily s’en irait, elle repartirait pour une longue sieste.

Les deux amies se firent un thé et restèrent à discuter un long moment dans la cuisine. Rose les rejoignit, une tasse de café à la main.

« On a parcouru les villages voisins pour voir si un emploi de secrétaire était disponible quelque part, annonça Emily.

– Et ?

– Rien pour l’instant. Mais c’est juste le premier jour, on trouvera bien quelque chose. »

On. Toujours on. Anna Meyer ne disait plus « je ». Elle n’avait plus la force de faire quoi que ce soit d’elle-même.

« J’espère aussi, se contenta-t-elle de répondre.

– Je désespère pas, reprit Emily. Des gens m’ont dit qu’un père de famille qui était arrivé en août avait trouvé un travail très rapidement dans une ferme à Stonevalley. Il est possible que tu trouves aussi, Anna. »

Celle-ci hocha la tête, l’air absent.

On est en train de la perdre….

Emily quitta la maison une heure plus tard. Elle serra Leo dans ses bras et lui demanda si tout allait bien pour lui à l’école. Puis une fois rassurée pour lui, elle se tourna vers Rose et se mit à fixer ses poignets. Gênée, l’adolescente réajusta les manches de son col roulé.

« À la prochaine, Emily. »

Elles s’étreignirent et l’amie de sa mère s’en alla sans rien ajouter de plus.

La maison fut à nouveau plongée dans le silence.

« Bordel, mais je le retrouverai jamais ! »

Dans sa chambre mansardée, un mug plein de thé à la menthe maintenant tiède dans la main droite, John commençait à perdre patience.

Cela faisait dix jours qu’il cherchait désespérément le blog du dessinateur dont il avait parlé à ses amis. Dix jours qu’il tombait sur un tas de blogs similaires, sans jamais retrouver le bon. Représenter les maladies et autres troubles mentaux par tout type de créatures était bien plus répandu que ce qu’il aurait cru chez les dessinateurs, aussi John était incapable de mettre la main sur le blog qui recensait les insectes qu’il avait dessinés. L’auteur avait dû changer de pseudonyme depuis le temps.

Le reste du groupe n’avait pas plus d’indices que lui. En attendant de retrouver ces informations, John les avait mis en garde :

« C’est pas une Envahie comme les autres. Elle a une maladie mentale et peu importe ce que c’est, on n’a pas besoin de lui parler de fantômes, de croque-mitaine ou d’autres trucs glauques… On se tient à distance au moins le temps de retrouver le blog. Puis si elle a du mal à s’intégrer au lycée ou besoin de soutien… oui, on pourra discuter ou traîner avec elle… Mais on la mêle pas à nos histoires. »

Tout le monde était d’accord avec cela, mais Andrew ne pouvait pas s’empêcher d’observer cette jeune fille esseulée qui avait été inscrite dans sa classe. Personne ne l’approchait, et elle n’approchait personne. Il ressentait de la compassion pour cette adolescente qu’on avait arrachée à son ancienne ville et forcée à vivre ici, loin de ses amis et de ses proches. Sans compter ces choses qui les touchaient, sa famille et elle. Il ne pouvait s’empêcher de se poser des questions et de s’inquiéter pour elle. Il espérait qu’elle avait quelqu’un à qui parler, même si ce n’était que par téléphone. Personne ne méritait d’être seul.

Quelques semaines supplémentaires s’écoulèrent. Le groupe commençait petit à petit à oublier cette histoire de blog, tous – hormis Andrew – devant se concentrer sur les épreuves de fin d’année qui arrivaient à grand pas.

Puis un jour, alors que plus personne ne s’y attendait, il y eut du nouveau dans l’affaire de la famille Meyer, grâce à un élément déclencheur que personne n’avait anticipé.

Cet après-midi-là, Dean était en train de réviser sans grande motivation. Il s’était attaqué aux matières qui lui posaient le plus de problèmes et plus le temps passait, plus il avait envie de lâcher l’affaire. Il était en train de somnoler sur son bureau quand sans prévenir, une ombre désormais familière passa à toute vitesse dans son champ de vision.

Il ne put s’empêcher de sursauter et se retourna vivement, aux aguets. Il attendit quelques instants, tendu et silencieux, fixant le coin de sa chambre dans lequel il l’avait vue apparaître. Et contre toute attente, elle lui fit face.

Indistincte, floue et informe, elle commença à changer lentement d’aspect. Dean se crispa, sans savoir à quoi s’attendre. Elle avait bien tenté quelques métamorphoses ces derniers temps, mais rien qui n’atteignait le niveau de ce qu’il avait vu la première fois.

Les bras couverts de chair de poule et tremblant sans même s’en rendre compte, il attendit qu’elle se fixe. Et peu à peu, elle adopta les traits d’une jeune fille, démesurément grande et maigre. Les traits de son semblant de visage se firent plus marqués, et Dean eut un choc lorsqu’il la reconnut enfin. Les yeux écarquillés, il fixa son expression immensément triste et dénuée de tout espoir quelques secondes avant que l’ombre ne s’évanouisse brusquement.

Dean se retourna vers son clavier, marqué par ce regard qui l’avait complètement vidé de l’intérieur.

Rose…

C’était la deuxième fois que l’ombre se métamorphosait d’une façon aussi précise et cette fois encore, il n’était pas près de l’oublier. Que cherchait-elle à faire ? À lui faire peur ? À l’angoisser, à le déprimer ?

Il soupira de frustration et ouvrit un nouvel onglet. Il ne pouvait s’empêcher de penser à Rose, et désormais, il était déterminé : il ne quitterait pas son bureau tant qu’il n’aurait pas retrouvé ce blog.

Il tomba miraculeusement dessus quelques heures plus tard. Il avait atterri sur un forum de discussion espagnol perdu dans les méandres d’Internet. La page sur laquelle il se trouvait était consacrée aux maladies mentales représentées à travers des dessins métaphoriques. Et quelqu’un mentionnait un blog dont le titre ne rappelait rien à Dean : Le monde d’Oizys. Il cliqua sur le lien et des images représentant des insectes étranges défilèrent sous ses yeux, similaires à ceux que John avait tracés sur son carnet.

Dean, à bout de patience, le consulta rapidement et envoya le lien à John par message privé en lui demandant de vérifier si c’était le bon. Au lieu de lui répondre directement sur la messagerie instantanée, celui-ci lui téléphona. L’adolescent décrocha en bâillant :

« Ouais ? Alors, c’est le blog que tu…?

– Merci ! Enfin ! l’interrompit son interlocuteur en hurlant. Enfin, tu me l’as trouvé ! Comment t’as fait ? »

Dean dut éloigner son portable de son oreille et grimaça. Passant sous silence la métamorphose de l’ombre, il répondit simplement :

« Et ben de rien, écoute. C’était sur un forum paumé sur Internet. Au moins, ça m’a fait réviser mon espagnol. »

Il lui raconterait sûrement le reste de l’histoire, mais une autre fois. Il n’avait pas envie de gâcher son enthousiasme.

« Super, merci. Venez tous chez moi, on va regarder ça ensemble.

– Quoi, maintenant ?

– Ben oui, maintenant. J’ai pas envie d’attendre une seconde de plus. Et Dean, vraiment, merci. Et bravo. »

Ils raccrochèrent et Dean se surprit à sourire. En quelques secondes, John lui avait remonté le moral après ces longues heures passées à chercher ce blog dans tous les coins et surtout, encore hanté par la vision de son ombre.

Il se prépara à sortir. Ses parents ne lui firent aucune remarque : il était plutôt assidu dans ses révisions et avait bien le droit de s’octroyer une petite sortie.


Dean se rendit à la ferme des Calligan en vélo et c’est pourquoi il fut le premier arrivé sur les lieux. John l’attendait sur le perron, il ne tenait pas en place. L’espace d’un instant, Dean eut presque l’impression qu’il allait l’étreindre alors qu’il s’avançait vers lui, l’œil pétillant. Mais il resta légèrement à distance et s’écria :

« Merci encore, Dean, je suis trop content que tu l’aies retrouvé !

– De rien, répondit-il calmement en contenant son sourire. Ça va me changer des révisions. »

John l’invita à entrer, et Jade et Chloe ne tardèrent pas à arriver.

« On était en plein atelier cookies quand tu nous as appelées, lança Chloe d’emblée. Alors j’espère que c’est important !

– Ça tu peux me croire, c’est important, rétorqua John d’un ton énigmatique. »

Ils attendirent quelques minutes à l’intérieur, mais Andrew ne se pointa pas. Ils l’appelèrent sur son portable, sans succès. John se résigna à lui laisser un message vocal pour lui demander de venir dès qu’il le recevrait.


Trop pressés, les adolescents se rendirent dans la chambre de John sans plus attendre. Andrew rattraperait le train en marche. Pour la première fois, Dean put voir à quoi ressemblait l’étage de la ferme des Calligan : tout était en bois et mansardé, et comme dans la grange, on y voyait de nombreuses poutres apparentes. La maison craquait de partout et l’adolescent se dit que la nuit, elle devait avoir une ambiance digne d’un film d’horreur.

Il les mena à sa chambre en emportant quelques chaises supplémentaires. Dans la pièce, de très nombreux posters étaient accrochés aux murs, de films et de séries divers, généralement à propos de science-fiction ou de fantastique. Dean les détailla et constata qu’il en connaissait la plupart. Il ne put s’empêcher de sourire en se disant que John et lui avaient encore plus de points communs que ce qu’il soupçonnait.

« C’est à ce demander de quoi on parle quand on traîne ensemble, songea-t-il en attardant son regard sur l’un des posters. »

Les fenêtres étaient grandes ouvertes et comme ils franchissaient la porte, un courant d’air glaciale les fit frissonner.

« Je sais qu’il fait un peu froid, mais croyez-moi, quand on les ferme c’est l’enfer. Ma chambre garde très bien la chaleur. »

Il s’assit sur sa chaise de bureau et commença à pianoter sur son clavier, ses trois amis assis autour de l’écran. Il retrouva le lien du blog dans sa conversation avec Dean, et les dessins défilèrent de nouveau.

« Le monde d’Oizys… J’aurais jamais pu le retrouver… Avant, il portait le nom du dessinateur, Stan quelque chose. Je me demande pourquoi il l’a changé comme ça. »

Des dizaines de dessins d’insectes étaient postés sur le blog. Chaque dessin était accompagné d’un descriptif de la pathologie d’une façon un peu romancée, et bien sûr, les quelques commentaires postés sous les œuvres montraient que les visiteurs du site pensaient que tout était fictif.

Au fil de sa visite sur le blog, John tomba sur ceux qu’il avait dessinés : l’araignée, la libellule et la mante religieuse. Il les ouvrit chacun dans un nouvel onglet, puis ils commencèrent par celui de l’araignée. John lut à voix haute :

« L’araignée agit sur le long terme. Chaque nuit, elle tisse sa toile autour de sa victime qui se retrouve empêtrée dedans au matin. Il est difficile de s’en défaire. Peu à peu, cette toile retire toute volonté de vivre à sa victime. Alors l’araignée monte sur le dos de sa proie, l’alourdissant et la courbant un peu plus chaque jour jusqu’à ce qu’elle s’effondre. »

La lecture de cette description jeta un froid.

« Une bonne grosse dépression nerveuse, murmura Jade. C’est la mère qui a ça ? »

– Oui, confirma John en soupirant. C’est déjà très lourd à porter… »

Ils continuèrent leurs recherches. Puis ils tombèrent sur la fameuse mante religieuse, la créature portée par le garçon.

« La mante religieuse se noue tout autour de la gorge de sa victime et resserre ses crochets autour de ses cordes vocales, privant la personne de sa voix. Elle peut surgir après un événement particulièrement difficile, ce qui l’amène à travailler en étroite collaboration avec la créature du stress post-traumatique. »

Jade se racla la gorge à la fin de sa lecture, l’air peiné.

« Pauvre garçon, soupira Chloe. Déjà à son âge… »

Sans faire aucun commentaire, John poursuivit ses recherches jusqu’à tomber sur le dessin de la libellule. Cette fois-ci, ce fut Dean qui se pencha sur l’écran pour lire l’encadré :

« La libellule fait en sorte que la victime se sente mal dans son corps. Elle peut étendre ses ailes comme elle le souhaite, et elle se sert de cette capacité pour les étaler contre tous les miroirs que sa victime va croiser. Ainsi, elle lui montre son corps ou une partie de son corps d’une façon distordue, lui créant un complexe démesuré. Cet insecte touche souvent les adolescents et jeunes adultes mal dans leur peau. Il lui arrive de reprendre son envol lorsque la personne reçoit des compliments sincères de la part de quelqu’un qui est très proche d’elle. »

« Eh ben… Quelle famille, conclut Jade. »

Le groupe resta silencieux un instant, puis le téléphone de John sonna. C’était un message d’Andrew. L’adolescent le lut rapidement avant de se prendre la tête entre les mains. Il soupira :

« Il viendra pas. Il est à l’hôpital, il est blessé à la tête. C’est arrivé ce matin, il s’est réveillé il y a seulement deux heures. Encore un coup de son croque-mitaine. »

La nouvelle jeta un froid. Tous restèrent silencieux, regardant sans le voir l’écran d’ordinateur de John, sur lequel s’affichaient ces dizaines de créatures plus dérangeantes les unes que les autres.

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